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dimanche 26 août 2012

Rangement (nouvelle)



Impossible de dormir en ce dimanche matin de vacances. Je me suis donc levé et j’ai commencé à faire du rangement dans le salon. Je suis tombé sur un vieux carton oublié au fond d’un placard et dedans, j’ai retrouvé la lettre de Jenny que je n’ai jamais ouverte. Puis la pluie s’est mise à tomber et j’ai abandonné l’idée du rangement : je me suis accoudé au rebord de la fenêtre pour humer l’odeur de la terre mouillée et chaude que j’aime tant. Je me suis souvenu…
J’avais toujours rêvé de visiter New York et je m’étais juré d’aller voir la Grosse Pomme après ma licence de lettres. J’avais tout organisé depuis longtemps et avais même noué des contacts épistolaires avec quelques New-Yorkais pour qu’ils me livrent des conseils. Jenny était l’une d’eux. Nous nous écrivions régulièrement depuis près d’un an quand je lui annonçai que j’avais enfin acheté mes billets d’avion. Nos échanges prirent une tournure un peu particulière quand nous joignîmes à nos envois quelques photographies – afin de nous reconnaître quand nous nous donnerions rendez-vous. Elle me parut jolie, je lui semblai charmant.
Deux jours avant mon voyage, ma sœur m’emmena dans un de ses magasins préférés où je trouvai un cadeau pour Jenny : un carré de soie représentant le Bal du Moulin de la Galette de Renoir. J’étais sûr que Jenny apprécierait, elle qui rêvait de visiter un jour le quartier de Montmartre. De retour à ma chambre de bonne, je trouvai la porte béante et mes affaires sens dessus dessous, mon passeport disparu, mes billets d’avion envolés. La mort dans l’âme, je téléphonai à Jenny pour lui dire que je ne la verrais pas cette année-là.
La pluie tombe toujours. J’ai mis un disque d’un groupe de jazz comme il s’en produit sans doute dans l’un des nombreux clubs new-yorkais. La cigarette que j’ai machinalement allumée se consume au bout de mes doigts.
Une semaine après le cambriolage, les tours du World Trade Center s’effondraient, heurtées par deux avions déroutés par des terroristes. D’après le circuit de visites que Jenny avait organisé, nous aurions dû nous y rendre ensemble ce 11 septembre 2001. Finalement, elle y est allée seule.
Je n’ai jamais visité New York. Mon rêve s’est transformé en cauchemar. Je regarde les cendres au bout de mes doigts et je pense à la vie qui se consume, au basculement des destins. Est-ce vraiment la peine d’ouvrir cette lettre, dix ans après ? Je palpe l’enveloppe, regarde le timbre, la date de son cachet : 10 septembre 2001, New York. Ce jour-là, je partai en Sicile, loin de toute tragédie, pour y oublier mes regrets de voyage avorté. J’y ai fait mieux encore : j’y ai rencontré ma femme. D’un rêve de vacances brisé, j’étais passé à des vacances de rêve. Le faire-part de décès que je trouvai au retour dans ma boîte aux lettres en a terni le souvenir.
Pourquoi cette nostalgie ? On ne choisit pas son destin… Une petite silhouette en pyjama apparaît sur le seuil de la porte et une main s’agrippe à la mienne. « Pourquoi tu pleures, Papa ? » Je ne pleure pas, mon fils, ce n’est que la pluie qui roule sur ma joue.
J’ai reposé la lettre dans le carton, à côté du carré de soie où sourit une immortelle jeune fille, l’air rêveur.




Ce texte a été publié sur le forum Maux d'auteurs, qui organise régulièrement des jeux d'écriture de petites nouvelles.

2 commentaires:

  1. Magnifique !!! J'adoooooooooore
    Triste mais plein de sagesse,d'espoir et de poésie....Bravo Marine !

    *Keren*

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  2. Merci, Keren ! Encore une fois, tes compliments me vont droit au coeur :-)

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