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samedi 11 août 2012

Un arrêt en forêt (nouvelle)


Elle écarte le dernier buisson, se redresse, se fige, frappée par un souvenir très flou, sur lequel elle n’arrive à mettre aucun mot et qui pourtant lui donne des sueurs froides. Hagarde, elle regarde la route déserte qui traverse la forêt. Elle a envie de hurler.
Ce n’était pas le chat noir de la voisine qui lui faisait peur, quand elle était petite. Ce n’était pas non plus le fantôme caché dans le placard de sa chambre, ni le lutin malveillant qui venait lui ricaner des cauchemars grinçants aux oreilles. Non, c’était autre chose, quelque chose d’innommable, de non identifiable, qui lui était arrivé ici, ou ailleurs. Et qui lui arrivait encore, à vingt ans de distance.

Cédric l’avait quittée deux jours auparavant. Elle avait le cafard et, comme d’habitude, avait trouvé une oreille attentive auprès de Julien, son ami d’enfance. Ils avaient longuement parlé au téléphone. Quelque temps après, au milieu de la nuit, il était à sa porte, dans sa combinaison de moto trempée :
— Tu n’allais pas bien, tout à l’heure.
Et comme justement, il passait par là… Sa combinaison dégoulinante et mal fermée indiquait plutôt qu’il était parti précipitamment de chez lui après avoir raccroché et qu’il avait roulé pendant plus d’une heure sous la pluie.
Ils avaient de nouveau beaucoup parlé et il était reparti à l’aube en lui proposant le remède miracle à ses chagrins d’amour : un week-end dans la maison de campagne de ses parents, qu’elle connaissait si bien pour y avoir passé les meilleures vacances de son enfance. Samedi matin, elle était montée derrière lui sur la moto, s’était agrippée à sa taille, et ils avaient roulé pendant deux heures, jusqu’à ce qu’elle lui demande de s’arrêter, comme d’habitude, sur la petite route en pleine forêt.
Les voilà garés sur le bas-côté. Il l’a toujours regardée avec amusement s’enfoncer dans les fougères, tordant ses chevilles fines et emmêlant ses cheveux dénoués à chaque branche. Et en sortant des fourrés, elle l’a toujours retrouvé tel qu’elle l’avait laissé, un petit sourire au coin des lèvres. Seulement aujourd’hui, il n’est plus là.

Tout lui revient soudainement à l’esprit, sans crier gare : sa mère malade après le divorce, leur premier départ à deux en vacances, un arrêt dans les bois où elle s’enfonce quelques minutes avant d’en ressortir, la voiture disparue… La solitude absolue, le sifflement du vent dans les arbres. Les dernières larmes de l’enfance, à onze ans. Puis, la voiture qui revient la chercher, la mère qui n’explique pas et qui évite son regard.
Alors, toi aussi, Julien ?
Derrière elle, les fougères tressaillent. La tête de Julien apparaît, interrogative, coiffée d’une feuille morte. Il s’approche en silence : malgré l’ombre des arbres, il a remarqué sa pâleur et les deux grosses larmes qui coulent sur ses joues. Il met la main sur son épaule pour la conduire à la moto, quelques mètres plus loin, derrière un buisson trapu. Il attend patiemment qu’elle éclate d’un rire nerveux.
— Tu cherchais encore ton chemin ?


Ce texte a été publié sur le forum Maux d'auteurs, qui organise régulièrement des jeux d'écriture de petites nouvelles.
Il est destiné à des adultes qui peuvent aussi apprécier les beaux dessins. N'hésitez donc pas à me proposer une illustration ; je vous laisserai avec plaisir un espace pour vous présenter dans la rubrique "beaux crayons" !

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